Vive la mariée !
Un mariage c'est beau. Surtout quand on est moi et maintenant. Je souris. Dedans je suis tellement content. Je ne suis pas le marié. C'est peut-être pour ça que je suis heureux.
Les uns serrés contre les autres sur ces bancs, on regarde tous dans la même direction : le curé avec sa tête de curé. Le marié avec sa tête de con. A côté de moi, ce doit être son père à lui. Là-bas c'est sa famille à elle. Ce que je suis heureux. Bon sang, je ne pensais pas que ça pourrait me faire cet effet-là ce mariage, je suis enthousiaste j’ai envie de dire.
Ça va aller très vite, bien sûr. Je sais. Concentration. Faut pas que je rate mon petit effet, c’est pas tous les jours qu’on se marie. Ce serait trop bête que je trébuche au mauvais moment ou que je bégaye. Ils m’en voudraient. Rire nerveux. Calme-toi bonhomme. C’est bientôt à moi. J’ai un peu le trac mais ça va aller, je crois. J’espère.
Tout le monde l'attend, c'est toujours comme ça, toujours tout le monde l'attend le beau moment où les mariés sortent sur le perron, elle blanche, lui souriant, et tous les amis ici réunis, famille et copains, tout le monde riant lançant du riz et des vive la mariée en veux-tu-en-voilà. Juste avant, le curé aura dit qu'il pouvait embrasser la mariée, mais ça m'aurait fait vomir de voir ça. Juste avant le curé aura dit pour le meilleur et tout le monde, moi le premier, aura pensé "mais surtout pour le pire".
Et juste avant ça, je me lèverai, sobre et fier dans mon superbe costume trois pièces spécialement loué pour l’occasion. Je me lèverai car ce sera mon tour, ma grande tirade, mon quart d’heure de gloire. Et ça y est, le grand moment c’est maintenant : le curé harangue « ou qu’il se taise à jamais », j’entre en scène.
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